C’est l'augmentation du risque d'accident grave du travail, en cas d'alcoolisation ponctuelle importante (API) plus d'une fois par semaine. [1]
Parce qu’il contribue à structurer nos vies quotidiennes, le milieu du travail devrait représenter un rempart face aux addictions et aux conduites à risque. Pourtant, dans certains cas, il "aggrave voire déclenche des conduites addictives" et la surconsommation d'alcool. [2]
>> Pour aller plus loin, consultez notre guide des addictions
Concrètement, on distingue deux types de consommations à risque par les populations actives.
- L'usage dangereux d'alcool, qui consiste en une consommation régulière et supérieure à deux verres par jour. 19,8% des hommes actifs et 8% des femmes actives sont concernés en 2021 [1].
- L'alcoolisation ponctuelle importante (API), également connue sous le nom de binge drinking, qui consiste à consommer "plus de six verres en une seule occasion". En 2021, 27,5% des hommes actifs et 11,5% des femmes actives connaissent une API au moins une fois par mois. Généralement liées au travail, en raison du stress ou à l'occasion d'un afterwork, ces API impactent aussi la qualité du travail accompli. [1]
Tous les métiers sont concernés par la consommation d'alcool au travail. Toutefois,
- certains secteurs sont davantage exposés, comme les métiers du spectacle, de l'hôtellerie-restauration ou les emplois en relation avec le public ; [2]
- certains postes sont plus touchés par les addictions, comme le travail de nuit, les postes à grande responsabilité, de vigilance ou de pilotage. [3].
Et en termes de catégories socioprofessionnelles ?
- les employés et les ouvriers sont les plus concernés parmi les travailleurs masculins,
- les femmes cadres sont plus nombreuses que les autres à consommer de l'alcool au-delà des quantités recommandées. [1]
Des secteurs et des postes qui doivent alerter les entreprises, et les encourager à adopter des mesures de prévention spécifiques.
En France, l’alcool fait partie des trois premières causes de mortalité évitables : il représente 49 000 décès en 2021 [4]. Et comme les autres sphères de nos vies quotidiennes, le monde du travail est aussi concerné par ces dangers…
- L'alcool peut causer des accidents du travail. Parce qu'il provoque une baisse de vigilance et une modification de la perception du risque, l'alcool au travail peut mettre en danger un salarié à son poste ou sur le trajet domicile-travail. [3, 4, 7] Le risque d'accident du travail grave est alors :
multiplié par deux en cas de consommation régulière excessive,
en hausse de 50% en cas d'API une fois par semaine. [1]
- L'alcool au travail peut être synonyme de risques psychosociaux. En 2020, l'Assurance maladie relevait 37% de troubles psychosociaux en plus parmi les maladies professionnelles. [5] Stress, isolement, anxiété : la pression au travail peut engendrer des comportements addictifs parmi lesquels la consommation d'alcool.
- L'alcool augmente le risque de perdre son emploi. Ainsi, un usage dangereux de l'alcool multiplie par 1,5 le risque de perte d'emploi à un an, et par 2 en cas de dépendance. [1]
˃˃ Lire notre article sur les troubles psychiques au travail
L'entreprise est responsable de garantir la santé et la sécurité des employés sur le lieu de travail. Les articles R4228-20 [6] et R4228-21 [7] du Code du travail précisent à quelles conditions il est possible d'y consommer de l'alcool. En particulier :
- Seuls quatre types d'alcools sont autorisés sur le lieu de travail : le vin, la bière, le cidre, le poiré, et rien d'autre !
- Des mesures de protection de la sécurité et santé doivent être prévues par l'entreprise, dans le règlement intérieur ou par note de service.
- Aucune personne en état d'ivresse n'est autorisée sur le lieu de travail. Des mesures disciplinaires peuvent être prises en cas d'ébriété en entreprise. [9].
Attention : en cas d'embauche d'un mineur en stage ou en apprentissage, la consommation d'alcool lui est totalement interdite, même pendant un pot de départ ! [8]
Pour prévenir les dangers de l'alcool au travail, il existe des gestes simples, accessibles à toute entreprise ou manager : [8]
- avant tout pot d'entreprise, rappeler par mail les règles et les risques liés à la consommation d’alcool ;
- proposer des boissons non alcoolisées et de la nourriture, tout en limitant les quantités d'alcool ;
- mettre des éthylotests à disposition ;
- sécuriser le transport, prévoir par exemple de raccompagner les salariés à leur domicile en taxi.
Par ailleurs, il existe des dispositifs grand public dont peuvent se saisir les entreprises, tels que l'alcoomètre et l'organisation d'une formation interne aux premiers secours en santé mentale. Pensez-y ! [12]
˃˃ Lire notre article sur le site alcoometre.fr pour s'autotester en quelques clics
L'alcool au travail n'est pas une question individuelle, mais un problème de société. [1] Les entreprises sont des actrices de premier plan de la prévention de l'alcoolisme. Depuis 2021, la Charte Esper encourage les entreprises à limiter l’apparition de conduites addictives à travers de véritables dispositifs de prévention, dans le cadre de la promotion de la santé au travail. [10]
Elle doit être menée avec les instances du personnel, mais aussi en lien avec la médecine du travail voire les services sociaux… Parmi les mesures indispensables d'un programme de prévention de l'alcool au travail, on trouve : [3, 11]
- l'importance d'intégrer l'évaluation du risque "addictions" au sein du document d'évaluation des risques de l'entreprise ;
- l'analyse des causes de stress au travail ;
- la sensibilisation mais aussi la formation du personnel sur les risques liés à l'alcool et le repérage de situations à risque.
Si vous souhaitez vous engager dans une démarche de prévention de l'alcool en entreprise, renseignez-vous auprès d'Addict'aide Pro, soutenue par la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives. [13]
[1] Mildeca et INSERM, 2021, https://www.drogues.gouv.fr/sites/drogues.gouv.fr/files/atoms/files/rapport_constances_web.pdf
[2] Ministère du travail, 2021 : https://travail-emploi.gouv.fr/actualites/article/lancement-du-dispositif-esper-pour-la-prevention-des-conduites-addictives-et-la
[3] Ministère du travail https://travail-emploi.gouv.fr/sante-au-travail/prevention-des-risques-pour-la-sante-au-travail/autres-dangers-et-risques/article/addictions
[4] Ministère de la santé et de la prévention, 2021. https://solidarites-sante.gouv.fr/prevention-en-sante/addictions/article/l-addiction-a-l-alcool
[5] Assurance maladie, 2021, https://assurance-maladie.ameli.fr/actualite/10-000-affections-psychiques-reconnues-en-accident-du-travail
[6] Légifrance, https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000029184975/
[7] Légifrance, https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000018531956/
[8] Institut National Sécurité, https://www.inrs.fr/publications/juridique/focus-juridiques/focus-pots-entreprise-alcool.html
[9] https://www.convention.fr/actualites/lalcool-travail-faire-lemployeur-56012
[10] Ministère du Travail, 2021, https://travail-emploi.gouv.fr/actualites/article/lancement-du-dispositif-esper-pour-la-prevention-des-conduites-addictives-et-la
[11] Addictaide, https://www.addictaide.fr/pro/guide/les-8-etapes-cles-pour-reussir-votre-politique-de-prevention/
[12] Premiers secours en santé mentale (PSSM), 2021, https://pssmfrance.fr/wp-content/uploads/2021/09/2022-Guide-employeurs-PSSM.pdf
[13] MILDECA, https://www.drogues.gouv.fr/actualites/addictaide-pro-un-site-mener-bien-demarche-de-prevention-conduites-addictives-milieu