En France, le nombre de cas d'allergie chez les enfants a doublé ces cinq dernières années, atteignant désormais 8 à 10 % des enfants de moins de douze ans. Parmi ces allergies, un nombre croissant est provoqué par certains aliments. Ces allergies alimentaires ne doivent pas être confondues avec les intolérances alimentaires, plus répandues mais moins spectaculaires. Les nourrissons peuvent être touchés, par exemple par l'allergie aux protéines de lait de vache.
Les allergies alimentaires entraînent généralement une réaction immédiate (plus rarement 24 à 48 heures plus tard), parfois très intense :
- un gonflement des lèvres, de la langue ou de la luette ;
- des rougeurs et des démangeaisons au niveau de la bouche ;
- des nausées ou des vomissements ;
- des coliques et des diarrhées ;
- des manifestations de la peau : démangeaisons, boutons, éruptions cutanées, eczéma, urticaire ;
- des maux de tête ;
- des symptômes ressemblant à l'asthme ;
- un gonflement (oedème) des paupières, des mains, des pieds, voire du visage et de la gorge. Dans les formes les plus sévères (choc anaphylactique), l'oedème de la gorge peut bloquer la respiration et mettre la vie en danger. On observe parfois une perte de conscience et un coma.
Lorsqu'un enfant souffre de terrain allergique (rhume des foins, asthme, eczéma, etc.), il est essentiel de consulter un médecin dès les premiers signes de réaction inhabituelle suite à l'ingestion d'un aliment. Cette mesure de précaution peut prévenir le risque de complications graves.
Plusieurs hypothèses sont invoquées pour expliquer la fréquence croissante des allergies alimentaires, en particulier chez les enfants.
Une plus grande diversification des aliments. Avec les transports aériens et la mondialisation des denrées alimentaires, nous sommes exposés à de nombreux aliments que nos ancêtres ne connaissaient pas. De plus, chez les nourrissons, une diversification alimentaire trop précoce a été associée à une augmentation des cas d'allergie de ce type.
Des végétaux de plus en plus sélectionnés. Les progrès de la sélection de nouvelles variétés de céréales, de fruits et de légumes ont modifié leur composition chimique. Ce phénomène nous expose à de nouvelles protéines ou à des quantités beaucoup plus élevées de protéines existantes.
Une complexification de la fabrication des aliments. La création continue de nouveaux ingrédients et de nouveaux procédés agroalimentaires entraîne de nouvelles allergies. Par exemple, des enfants qui mangent du pain sans problème peuvent devenir allergiques aux isolats de blé (des protéines de blé rendues plus solubles et utilisées comme liants dans les charcuteries).
Une influence négative de la pollution de l'air par des particules de diesel ou des solvants, par exemple, et qui augmenterait la sensibilité allergique en général.
Une trop grande hygiène ! Certains scientifiques pensent que, chez les enfants, l'absence d'exposition aux micro-organismes dans l'environnement et l'alimentation favoriserait l'apparition d'un terrain allergique.
Chez les enfants, les trois quarts des allergies sont dues à cinq familles d'aliments : les oeufs, l'arachide (cacahuète), le lait de vache, les céréales et le poisson. D'autres aliments mis en cause ont également été identifiés.
- Arachide (cacahuète)
- Céleri, cerfeuil
- Fruits à coque (amandes, noix, noisettes, pistaches, pignons de pin, noix de cajou, noix de pécan, etc.)
- Kiwi, avocat, banane, châtaigne
- Lupin
- Moutarde
- Papaye, ananas
- Pomme, poire, pêche, abricot, cerise, fraise, etc.
- Céréales : blé, seigle, orge, etc.
- Radis, raifort
- Sésame
- Soja
- Tomate
- Crustacés
- Oeufs
- Lait
- Poisson et gélatine de poisson
- Escargots
De simples traces de ces aliments peuvent suffire à déclencher une crise chez les enfants allergiques. Par exemple, un biscuit fabriqué dans un atelier où sont utilisées des arachides (destinées à un autre produit) peut être contaminé par la poussière d'arachide présente dans le système de ventilation. Ces possibilités de contamination sont attentivement surveillées et prévenues par les industriels. Elles justifient parfois les mentions "Traces de", "Peut contenir" ou "Fabriqué dans un atelier utilisant" sur les emballages.
Le meilleur moyen de prévenir une crise allergique est de supprimer le, ou les aliments responsables de l'alimentation de l'enfant. Cela est parfois compliqué car certaines substances allergisantes sont présentes dans de très nombreux produits ou préparations. C'est le cas de l'arachide, omniprésente dans l'industrie agroalimentaire, voire dans les produits de toilette et d'hygiène.
Lire les étiquettes est évidemment indispensable, mais constitue parfois une source de frustration, car de nombreux industriels se protègent d'éventuelles poursuites judiciaires en indiquant la présence de traces d'aliments allergisants, alors que leurs produits n'en contiennent pas ! Les parents ont alors beaucoup de mal à identifier des produits que leur enfant allergique pourra consommer en toute sécurité. Le rayon des chocolats et des biscuits en est un exemple particulièrement frappant. Une directive européenne adoptée en 2003 et intégrée au droit français en 2005 devrait clarifier la façon dont la présence d'aliments allergisants est mentionnée sur les emballages.
La frustration des parents d'enfants allergiques ne s'arrête pas aux portes des supermarchés : les artisans et les restaurateurs sont souvent très mal informés des contraintes imposées par une allergie alimentaire et du risque encouru. Par exemple, un boulanger peut assurer à son client que le pain au chocolat qu'il vient d'acheter ne contient pas d'oeuf en oubliant qu'il l'a doré au jaune d'oeuf ! De nombreux parents (en particulier ceux d'enfants allergiques aux arachides ou aux oeufs) préfèrent s'abstenir de les emmener manger au restaurant.
À l'école, des mesures particulières sont prises pour accueillir les enfants qui souffrent d'allergie alimentaire.
Quelques règles permettraient de prévenir l'apparition des allergies alimentaires chez les enfants :
- Éviter de manger des aliments allergisants pendant l'allaitement, en particulier lorsqu'un parent, ou les deux, sont sujets aux allergies (rhume des foins ou asthme, par exemple).
- Retarder la diversification alimentaire chez les enfants. Il est préférable que le nourrisson ne reçoive que du lait maternel ou artificiel avant l'âge de six mois et que les règles de diversification alimentaire soient respectées. En particulier, il faut impérativement éviter la consommation d'arachides ou de fruits à coque (amandes, noix, noisettes, noix de cajou, etc.) avant l'âge de trois ans.
Les parents dont les enfants souffrent d'allergie alimentaire sont souvent inquiets à propos des crises qui pourraient se produire en cas d'ingestion accidentelle, à la cantine ou dans la cour de récréation. À leur demande auprès du directeur de l'établissement, la rédaction d'un projet d'accueil individualisé (PAI) peut être envisagée pour l'année scolaire. Selon le degré de sévérité de l'allergie, le PAI précise les conditions dans lesquelles l'enfant prendra son déjeuner et ses collations. Si l'allergie est sévère, l'usage de la cantine est déconseillé et l'enfant devra consommer un plateau spécifique livré par une société spécialisée ou un panier repas confectionné par ses parents. Si l'allergie est modérée, des aménagements particuliers et une formation du personnel peuvent permettre l'usage de la cantine par l'enfant.
En dépit des consignes officielles invitant les cantines municipales à accueillir les enfants souffrant d'allergie alimentaire, il faut savoir que les communes ont le droit de refuser de prendre en charge un enfant allergique, même muni d'un panier repas préparé par ses parents.
Les enfants allergiques apprennent assez vite à connaître les aliments qui leur sont interdits, et les premiers signes d'une crise. Vous pouvez aider votre enfant à se familiariser avec sa maladie en lisant systématiquement avec lui les listes d'ingrédients des aliments qu'il peut ou non consommer. Cet exercice lui permettra d'apprendre les diverses formes et appellations de l'aliment auquel il est allergique et dissipera le sentiment d'arbitraire qu'il pourrait ressentir face aux interdits alimentaires qui lui sont imposés.
Les allergies alimentaires n'empêchent pas les enfants de pratiquer une activité physique ou un sport. Il est préférable que les collations consommées après l'effort soient confectionnées par les parents, afin que l'enfant ne succombe pas à la tentation de partager le goûter de l'un de ses camarades.
Les enfants qui souffrent d'allergie alimentaire aux protéines de l'oeuf peuvent développer une réaction allergique après l'administration d'un vaccin en contenant (rougeole, grippe, fièvre jaune, rage et encéphalite à tiques). Dans ce cas, des tests allergiques mesurant la réaction au vaccin sont réalisés au préalable. Ils aident le médecin allergologue à établir un protocole de vaccination sous stricte surveillance médicale. Chez les nourrissons souffrant d'une allergie sévère à l'oeuf, le vaccin contre la rougeole est généralement repoussé d'une année.
Pour un enfant souffrant d'allergie alimentaire, prendre un repas hors de son domicile présente plus de risques. Pour cette raison, il est indispensable d'avoir toujours sur soi sa trousse d'urgence. À l'étranger, il est plus difficile de savoir ce que contiennent les aliments. Renseignez-vous donc sur les habitudes alimentaires du pays de destination. Si votre enfant est allergique à l'arachide (cacahuète) il devra éviter les pays où cet aliment et ses produits dérivés sont omniprésents : Afrique, Asie du Sud-Est, États-Unis, par exemple. Avant le départ, l'allergologue de votre enfant peut décider de pratiquer certains tests afin de dépister une allergie alimentaire à un aliment exotique (tels la papaye, la goyave ou le curry).
Lorsqu'on se déplace en voyage ou en sortie, il convient de toujours avoir avec soi :
- un médicament corticoïde en comprimés à prendre en cas de crise sévère ;
- un médicament antihistaminique en comprimés à prendre en cas de crise modérée ;
- un médicament bronchodilatateur à inhaler en cas de crise de type asthme ;
- de l'adrénaline par voie injectable, avec des seringues ou un stylo injecteur, l'ordonnance qui les prescrit ;
- une copie du protocole de soins d'urgence du PAI qui définit la conduite à adopter selon le degré de gravité de la crise ;
- pour les voyages à l'étranger, la dernière ordonnance du médecin traitant, si possible dans la langue du pays de destination.
Dans les avions, la nourriture servie peut poser des problèmes. Parfois, chez un enfant très allergique à l'arachide, les poussières de cacahuète présentes dans l'air de la cabine peuvent suffire à déclencher une crise. De très nombreuses compagnies aériennes ont équipé leurs trousses de secours d'adrénaline injectable pour pouvoir intervenir rapidement. Néanmoins, le personnel de bord est rarement formé à leur usage. Dans le doute, emportez toujours votre trousse d'urgence en cabine. La plupart des compagnies aériennes peuvent, si elles ont été prévenues lors de la réservation, fournir un repas adapté aux allergies alimentaires les plus courantes.