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Ecoutez le podcast d'Anthony Mahé
L’animateur (Clotilde) :
Bonjour et aujourd’hui nous accueillons Anthony Mahé, sociologue et directeur de la connaissance au sein du cabinet Eranos, qui va nous parler de notre attachement au téléphone portable. Alors il est omniprésent. Il nous accompagne partout. Il nous abreuve de messages et d’infos. Bref, est-ce que le téléphone portable ne nous rendrait pas tous accros ?
Anthony :
Pour commencer, on peut faire un constat chiffré : aujourd’hui, 94 % de la population française possède un téléphone portable. Et pour les 18-24 ans, c’est quasi 100 %. Pour rappel, les Français n’étaient que 67 % à en posséder un en 2004. Donc une chose est sûre : le mobile est devenu un objet incontournable dans nos vies.
Avec la 4G et bientôt la fameuse 5G qui fait l’actualité en ce moment, la connexion est toujours fluide, on télécharge des séries en quelques minutes, on est en permanence connecté à son travail ou à ses amis. En somme, il se passe toujours quelque chose sur l’écran de son téléphone. Donc on ne le quitte plus.
Clotilde :
Le fait qu’il se passe toujours quelque chose sur son téléphone, ce n’est pas justement ça, le problème ?
Anthony :
Tout à fait ! Cet attachement au téléphone porte d’ailleurs un nom : le FOMO. C’est un acronyme qui signifie "Fear Of Missing Out". En français, ça veut dire la peur de rater quelque chose d’important. Cette angoisse d’être coupé du monde rend les utilisateurs de smartphone quasiment incapables de résister aux notifications de leur téléphone.
L’Observatoire de l’hyper-connexion mené par AXA Prévention révèle qu’un Français sur deux reconnaît consulter son téléphone toutes les 10 minutes pour être sûr de ne pas passer à côté d’une notification ou d’un message.
On dit que nos rythmes de vie d’accélèrent, à cause du travail notamment, des temps de trajet. En réalité, cette sensation d’un temps accélérée résulte du fait que l’on superpose de plus en plus d’activités dans nos vies quotidiennes, en particuliers avec les smartphones qui s’introduisent dans les conversations, les réunions, la mobilité. Mais nos cerveaux ne sont pas multitâches, comme le disent les neuroscientifiques on ne se sait pas faire plusieurs choses en même temps sauf si c’est automatisé comme marcher. Les usages permanents du smartphone dilue notre attention et nos capacités de concentration. L’enjeu est encore plus fort chez les plus jeunes.
Clotilde :
Et on peut s’en sortir ? Il y a des solutions ?
Anthony :
Bien sûr, et heureusement ! Mais ça implique de remettre le smartphone à sa juste place : celle d’un simple outil parmi d’autres.
Il ne faut pas oublier que la TV ou la lecture du journal sont des coupures quand on rentre chez soi, des petits rituels censés nous régénérer. Ces activités se diluent désormais dans la continuité du quotidien, il n’y a plus de moments dédiés. A la fin, cela produit la sensation que le temps s’accélère. La sagesse populaire dit qu’il y a un temps pour tout, c’est cela qu’on a un peu déconstruit avec le smartphone. C’est pour cela qu’il faut donc remettre du rituel.
Comment ? En variant les supports : regarder la TV en famille, lire un livre ou un journal papier de temps à autre, imprimer quelques photos, etc. et regarder bien sûr son smartphone de temps en temps car ce sont des expériences différentes, en termes de sensation, d’attention accordée mais aussi de lien avec les autres. La diversification est la clé.
Clotilde :
Merci Anthony Mahé. Ça sera le mot de la fin.
En conclusion, on ne le répétera jamais assez : n’oubliez pas que VOUS AVEZ LA VIE DEVANT VOUS !
Alors levez les yeux !